$\renewcommand{\vec}[1]{\mathbf{#1}}$ $\newcommand{\fvec}[1]{\tilde{\vec{#1}}}$ $\newcommand{\ffvec}[1]{\check{\vec{#1}}}$ $\newcommand{\fffvec}[1]{\check{\tilde{\vec{#1}}}}$ $\newcommand{\f}[1]{\tilde{#1}}$ $\newcommand{\ff}[1]{\check{#1}}$ $\newcommand{\fff}[1]{\check{\tilde{#1}}}$ $\newcommand{\reels}{\mathbb{R}}$ $\newcommand{\dif}{\mathrm{d}}$ $\newcommand{\eps}{\varepsilon}$ $\newcommand{\ka}{\kappa}$ $\newcommand{\xy}{\mathbin{/\mkern-4mu/}}$

Coefficients de réflexion et de transmission

Nous voulons maintenant calculer comment un empilement de couches réfléchit et transmet la lumière.

1. Coefficients de réflexion et transmission

Nous voulons maintenant faire pour l'emplilement de couches au complet ce que nous avons fait à la page précédente pour une seule interface. Pour chaque polarisation, nous avons comme solution générale $$\boldsymbol\Phi_\pi(z) = c_{0+}~e^{i \gamma_0(z-z_0)}|~0, + \gt + c_{0-}~e^{-i \gamma_0(z-z_0)}|~0, - \gt$$ dans le milieu entrant et $$\boldsymbol\Phi_\pi(z) = c_{(n+1)\mkern 2mu +}~e^{i \gamma_{n+1}(z-z_n)}|~{n+1}, + \gt + c_{(n+1)\mkern 1mu -}~e^{-i \gamma_{n+1}(z-z_n)}|~{n+1}, - \gt$$ dans le milieu sortant.

Nous voulons trouver une relation de la forme $$\begin{bmatrix} c_{(n+1)\mkern 1mu +} \\ c_{0\mkern 1mu -} \end{bmatrix} = \begin{bmatrix} t_{0\mkern 1mu (n+1)} & r_{(n+1)\kern 1mu 0} \\ r_{0\mkern 1mu (n+1)} & t_{(n+1)\kern 1mu 0} \end{bmatrix} \begin{bmatrix} c_{0\mkern 1mu +} \\ c_{(n+1)\mkern 1mu -} \end{bmatrix}$$ entre les quatre coefficients $c_{0\mkern 1mu \pm}$ et $c_{(n+1)\mkern 1mu \pm}$. Les quantités $r_{0\mkern 1mu (n+1)}$ et $r_{(n+1)\mkern 1mu 0}$ sont appelées coef­fi­cients de réflexion et les quantités $t_{0\mkern 1mu (n+1)}$ et $t_{(n+1)\mkern 1mu 0}$, coef­fi­cients de transmission

La technique pour calculer ces coefficient est la même que pour les coefficients de Fresnel. Il y a cependant une étape suplémentaire : il faut trouver une matrice $\vec{N}$ telle que

$\boldsymbol\Phi_\pi(z_0)=\mkern 1mu\vec{N}\mkern 1mu\boldsymbol\Phi_\pi(z_n).$

Une fois cette matrice trouvée, on exprime que si $c_{(n+1)\mkern 1mu -}=0$ et $c_{0\mkern 1mu +}=1$, on doit avoir $$|~0, + \gt+r_{0\mkern 1mu (n+1)}|~0, - \gt =t_{0\mkern 1mu (n+1)}\mkern 1mu\vec{N}\mkern 1mu|~n+1, + \gt .\tag{1}$$

En multipliant (1) par $\lt 0, +~|$ et $\lt 0, -~|$, on obtient $$\begin{array} {l} 1=t_{0\mkern 1mu (n+1)}\lt 0, +~|\mkern 1mu\vec{N}\mkern 1mu|~n+1, + \gt, & r_{0\mkern 1mu (n+1)}=t_{0\mkern 1mu (n+1)}\lt 0, -~|\mkern 1mu\vec{N}\mkern 1mu|~n+1, + \gt ,\end{array}$$ ce qui permet de calculer $r_{0\mkern 1mu (n+1)}$ et $t_{0\mkern 1mu (n+1)}.$ De manière analogue, si $c_{(n+1)\mkern 1mu -}=1$ et $c_{0\mkern 1mu +}=0$, il faut qu'on ait $$t_{(n+1)\mkern 1mu 0}|~0, - \gt = \mkern 1mu\vec{N}\mkern 1mu|~(n+1), - \gt + r_{(n+1)\mkern 1mu 0}\mkern 1mu\vec{N}\mkern 1mu|~n+1, + \gt .\tag{2}$$ pour $z=z_0$. De nouveau, en multipliant (2) par $\lt 0, +~|$ et $\lt 0, -~|$, on obtient $$\begin{array} {rr} 0=\lt 0, +~|\mkern 1mu\vec{N}\mkern 1mu|~n+1, - \gt + r_{(n+1)\mkern 1mu 0}\lt 0, +~|\mkern 1mu\vec{N}\mkern 1mu|~n+1, + \gt ,\\ t_{0\mkern 1mu (n+1)}=\lt 0, -~|\mkern 1mu\vec{N}\mkern 1mu|~n+1, - \gt + r_{(n+1)\mkern 1mu 0}\lt 0, -~|\mkern 1mu\vec{N}\mkern 1mu|~n+1, + \gt ,\end{array}$$ ce qui permet maintenant de calculer $r_{(n+1)\mkern 1mu 0}$ et $t_{(n+1)\mkern 1mu 0}.$

2. Matrices caractéristiques

Les matrices caractéristiques fournissent une méthode pour calculer la matrice $\vec{N}$. On a vu comment on pouvait relier les valeurs du champ $\boldsymbol\Phi_\pi(z)$ en deux points $z_a$, $z_b$ d’un même milieu $j$ par la formule $$\boldsymbol\Phi_\pi(z_b)=\exp\left(i\dfrac{\omega}{c}\boldsymbol\Delta_{\pi j}(z_b-z_a)\right)\boldsymbol\Phi_\pi(z_a)$$ où $$\exp\left(i\dfrac{\omega}{c}\boldsymbol\Delta_{\pi j}z\right)= |~j,+\gt \exp\left(i\gamma_jz\right) \lt j,+~| + |~j,-\gt \exp\left(-i\gamma_jz\right) \lt j,-~|.$$ Nous allons définir les matrices caractéristiques $\vec{N}_{j\kern 2mu k}$ comme des matrices avec la propriété $$\boldsymbol\Phi_\pi(z_j)=\vec{N}_{j\kern 2mu k}\boldsymbol\Phi_\pi(z_k).$$

Si $k=j\pm 1$, il suffit de prendre $$\begin{array} {ll} \vec{N}_{j\kern 2mu j-1}=\exp\left(i\dfrac{\omega}{c}\boldsymbol\Delta_{\pi j}d_j\right), & \vec{N}_{j\kern 2mu j+1}=\exp\left(-i\dfrac{\omega}{c}\boldsymbol\Delta_{\pi (j+1)}d_{j+1}\right), \end{array}$$ où $d_j=z_j-z_{j-1}$ est l’épaisseur de la couche $j$. Pour des valeurs non consécutives de $j$ et $k$, on utilise la multiplication matricielle. Par exemple, $$\begin{array} {ll} \vec{N}_{j+1\kern 2mu j-1}=\vec{N}_{j+1\kern 2mu j}\vec{N}_{j\kern 2mu j-1}, & \vec{N}_{j+2\kern 2mu j-1}=\vec{N}_{j+2\kern 2mu j+1}\vec{N}_{j+1\kern 2mu j-1}, \end{array}$$ etc. À noter que $\vec{N}_{j\kern 2mu j}=\vec{I}$, où $\vec{I}$ est la matrice identité 2×2 et que $\vec{N}_{j\kern 2mu k}=\vec{N}_{k\kern 2mu j}^{-1}$.

La matrice que nous cherchons à la section 1 est $\vec{N}=\vec{N}_{0\kern 2mu n}$.

3. Combinaison de deux empilements

Soit $k$ un nombre entre $1$ et $n$. Supposons que nous connaissions les valeurs de $r_{0\mkern 2mu k}$ et $t_{0\mkern 2mu k}$, $r_{k\mkern 2mu 0}$ et $t_{k\mkern 2mu 0}$, ainsi que $r_{k\mkern 2mu n+1}$ et $t_{k\mkern 2mu n+1}$. Comment peut-on calculer les valeurs de $r_{0\mkern 2mu n+1}$ et $r_{0\mkern 2mu n+1}$ ? La réponse est simple. On a $$\vec{N}_{0\kern 2mu n} =\vec{N}_{0\kern 2mu k-1} \vec{N}_{k-1\kern 2mu k} \vec{N}_{k\kern 2mu n}$$ c’est-à-dire $$\vec{N}_{0\kern 2mu n} =\vec{N}_{0\kern 2mu k-1} |~k,+\gt e^{-i\gamma_kd_k} \lt k,+~| \vec{N}_{k\kern 2mu n} + \vec{N}_{0\kern 2mu k-1} |~k,-\gt e^{i\gamma_kd_k} \lt k,-~| \vec{N}_{k\kern 2mu n}.$$

En substituant cette valeur dans les résultats de la section 1, on obtient avec un peu d’algèbre $$\begin{array} {lr} r_{0\kern 2mu n+1}=r_{0\kern 2mu k}+\dfrac{t_{0\kern 2mu k}r_{k\kern 2mu n+1}t_{k\kern 2mu 0}e^{2\kern 2mu \zeta_kd_k}}{1-r_{k\kern 2mu 0}r_{k\kern 2mu n+1} e^{2\kern 2mu \zeta_kd_k}}, & t_{0\kern 2mu n+1}=\dfrac{t_{0\kern 2mu k}t_{k\kern 2mu n+1}e^{\zeta_kd_k}}{1-r_{k\kern 2mu 0}r_{k\kern 2mu n+1} e^{2\kern 2mu \zeta_kd_k}}. \end{array} \tag{3}$$

4. Matrices de transfert

Le problème de la section 1 peut ausi être résolu en utilisant autre méthode, connue sous le nom de méthode des matrices de transfert. Désignons par$|~z, \pm \gt$ les vecteurs propres $\pm$ dans le milieu où $z$ se trouve. Par exemple, si on avait $z_2 \lt z \lt z_3$, on serait dans la couche numéro $3$ et donc $|~z, \pm \gt$ serait la même chose que $|~3, \pm \gt$. On peut écrire la solution générale sous la forme $$\boldsymbol\Phi_\pi(z) = c_+(z)~|~z, + \gt + c_-(z)~|~z, - \gt.$$

La méthode des matrices de transfert consiste à étudier comment le vecteur $[c_+(z)~~~c_-(z)]^T$ évolue lorsque $z$ se déplace dans le milieu stratifié. Un avertissement est de rigueur : le vecteur $\boldsymbol\Phi_\pi(z)$ est continu aux interfaces, mais pas les vecteurs $|~z, \pm \gt$. Conclusion : le vecteur $[c_+(z)~~~c_-(z)]^T$ lui non-plus n'est pas continu aux interfaces.

Nous avons besoin d'une matrice $\vec{T}$ avec la propriété $$\begin{bmatrix} c_+(z_0-0) \\ c_-(z_0-0) \end{bmatrix} = \vec{T} \begin{bmatrix} c_+(z_n+0) \\ c_-(z_n+0) \end{bmatrix}.$$

Cette matrice peut être obtenue comme un produit de matrices de phase et de matrices d'interface. Par exemple, à l'interface $j$, on peut montrer avec les résultats de la page précédente qu'on aura $$\begin{bmatrix} c_+(z_j-0) \\ c_-(z_j-0) \end{bmatrix} = \dfrac{1}{t_{j\mkern 2mu (j+1)}}\begin{bmatrix} 1 & r_{j\mkern 2mu (j+1)} \\ r_{j\mkern 2mu (j+1)} & 1 \end{bmatrix} \begin{bmatrix} c_+(z_j+0) \\ c_-(z_j+0) \end{bmatrix}$$ et lorsque $z$ passe de $z_j-0$ à $z_{j-1}+0$ dans le milieu $j$, on aura des changements de phase donnés par $$\begin{bmatrix} c_+(z_{j-1}+0) \\ c_-(z_{j-1}+0) \end{bmatrix} = \begin{bmatrix} \exp\left(-i\gamma_j d_j\right) & 0 \\ 0 & \exp\left(i\gamma_j d_j\right) \end{bmatrix} \begin{bmatrix} c_+(z_j-0) \\ c_-(z_j-0) \end{bmatrix}.$$

En termes de matrice de transfert, les équations (1) et (2) sont remplacées par : $$\begin{array} {lll} \begin{bmatrix} 1 \\ r_{0\mkern 1mu (n+1)} \end{bmatrix} = \vec{T} \begin{bmatrix} t_{0\mkern 1mu (n+1)} \\ 0 \end{bmatrix} & \mathsf{et} & \begin{bmatrix} 0 \\ t_{(n+1)\mkern 1mu 0} \end{bmatrix} = \vec{T} \begin{bmatrix} r_{(n+1)\mkern 1mu 0} \\ 1 \end{bmatrix}. \end{array}$$

5. Notes et références

Poynting
George Bidell Airy (1801-1892).

Le cas particulier des formules (3) correspondant à $k=n=1$ se retrouve dans la majorité des ouvrages sur l'optique physique sous une forme un peu différente : $$\begin{array} {ll} r_{0\kern 2mu 2}=\dfrac{r_{0\kern 2mu 1}+r_{1\kern 2mu 2}e^{2i \gamma_1d_1}}{1+r_{0\kern 2mu 1}r_{1\kern 2mu 2}e^{2i \gamma_1d_1}}, & t_{0\kern 2mu 2}=\dfrac{t_{0\kern 2mu 1}t_{1\kern 2mu 2}e^{i \gamma_1d_1}}{1+r_{0\kern 2mu 1}r_{1\kern 2mu 2}e^{2i \gamma_1d_1}}. \end{array}$$ Le passage d'une forme à l'autre se fait en utilisant les relations au bas de la page précédente (relations qui, notons le, ne se généralisent pas pour $n \gt 1$). Ce cas particulier des formules (3) a été publié par G. B. Airy en 1833.

Ce qui rend les formules (3) intéressantes, c'est qu'elles révèlent un schéma de réflexions multiples dans la couche $k$. En effet, on peut les mettre sous la forme $$\begin{array} {ll} r_{0\kern 2mu n+1}=r_{0\kern 2mu k}+\sum_{n=0}^\infty t_{0\kern 2mu k}r_{k\kern 2mu n+1}(r_{k\kern 2mu 0}r_{k\kern 2mu n+1})^n t_{k\kern 2mu 0}e^{(2n+2)\kern 2mu \zeta_kd_k}, & t_{0\kern 2mu n+1}=\sum_{n=0}^\infty t_{0\kern 2mu k}(r_{k\kern 2mu n+1}r_{k\kern 2mu 0})^n t_{k\kern 2mu n+1}e^{(2n+1)\kern 2mu \zeta_kd_k} \end{array} \tag{4}$$ que nous utiliserons à la page suivante.

Milieu final parfaitement réfléchissant

Le cas idéalisé où le milieu $n+1$ est un conducteur parfait se traite de manière similaire à ce qui précède. La seule différence, c'est que le champ électrique tangent à la dernière interface doit être nul. Pour les deux polarisations, on doit avoir $$\boldsymbol\Phi_\pi(z_n)= \alpha \mkern 1mu[0~1]^T$$ pour un certain $\alpha$ et l'équation (1) est remplacée par $$|~0, + \gt+r_{0\mkern 1mu (n+1)}|~0, - \gt =\alpha \mkern 1mu\vec{N}\mkern 1mu [0,~1]^T .\tag{1'}$$

En multipliant (1') par $\lt 0, +~|$ et $\lt 0, -~|$, on obtient $$\begin{array} {l} 1=\alpha \mkern 1mu\lt 0, +~|\mkern 1mu\vec{N}\mkern 1mu [0~1]^T, & r_{0\mkern 1mu (n+1)}=\alpha \mkern 1mu\lt 0, -~|\mkern 1mu\vec{N}\mkern 1mu [0~1]^T ,\end{array}$$ ce qui permet de calculer $r_{0\mkern 1mu (n+1)}$. Si on préfère utiliser les matrices de transfert, il faut d'abord trouver une matrice $\vec{T}$ telle que $$\begin{bmatrix} c_+(z_0-0) \\ c_-(z_0-0) \end{bmatrix} = \vec{T} \begin{bmatrix} c_+(z_n-0) \\ c_-(z_n-0) \end{bmatrix}.$$ L'équation (1') est alors remplacée par $$\begin{array} {lll} \begin{bmatrix} 1 \\ r_{0\mkern 1mu (n+1)} \end{bmatrix} = \alpha \mkern 1mu \vec{T} \begin{bmatrix} 1 \\ 1 \end{bmatrix}~~(\pi = p) & \mbox{ou} & \begin{bmatrix} 1 \\ r_{0\mkern 1mu (n+1)} \end{bmatrix} = \alpha \mkern 1mu \vec{T} \begin{bmatrix} 1 \\ -1 \end{bmatrix}~~(\pi = s). \end{array}$$

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