$\renewcommand{\vec}[1]{\mathbf{#1}}$ $\newcommand{\fvec}[1]{\tilde{\vec{#1}}}$ $\newcommand{\ffvec}[1]{\check{\vec{#1}}}$ $\newcommand{\fffvec}[1]{\check{\tilde{\vec{#1}}}}$ $\newcommand{\f}[1]{\tilde{#1}}$ $\newcommand{\ff}[1]{\check{#1}}$ $\newcommand{\fff}[1]{\check{\tilde{#1}}}$ $\newcommand{\uvec}[1]{\hat{\vec{#1}}}$ $\newcommand{\reels}{\mathbb{R}}$ $\newcommand{\dif}{\mathrm{d}}$ $\newcommand{\eps}{\varepsilon}$ $\newcommand{\xy}{\mathbin{/\mkern-4mu/}}$ $\newcommand{\re}{\text{Re}\mkern1mu}$ $\newcommand{\im}{\text{Im}\mkern1mu}$ $\newcommand{\ka}{\kappa}$

It's Hard to Soar with the Eagles When You are Surrounded by Turkeys!

Ondes planes dans les milieux isotropes

Soient les équations de Maxwell-Lorentz libres : $$\begin{array} {ll} \nabla \times \fvec{H} + i\omega \eps \fvec{E} = 0, & \nabla \times \fvec{E}-i \omega \fvec{B} =0. \end{array} \tag{1}$$ Nous supposerons que le permittivité diélectrique $\eps$ dans (1) est de la forme $\eps = \eps_0\eps'$ avec $\eps'$ réel. On cherche à savoir s'il existe des solutions qui sont des ondes planes, c'est-à-dire avec un champ électromagnétique de la forme $$\begin{array} {ll} \fvec{E}(\vec{x}) = \exp(i\vec{k} \cdot \vec{x})~\vec{e}, & \fvec{H}(\vec{x}) = \exp(i\vec{k} \cdot \vec{x})~\vec{h}, \end{array} \tag{2}$$ où les vecteurs complexes $\vec{e}$ et $\vec{h}$ sont constants et où le vecteur d'onde $\vec{k}$ est un vecteur réel constant.

1. Ondes planes : propagation

Pour que (2) soit solution de (1), on devra avoir $$\begin{array} {ll } i\vec{k} \times \vec{h} + i\omega \eps' \vec{e} = 0, & i\vec{k} \times \vec{e}-i \omega \mu_0 \vec{h} =0. \end{array} \tag{3}$$ Si on introduit l'impédance caractér­istique du vide $Z_0=\mu_0 c$ et le vecteur d'onde réduit $\boldsymbol{\ka}=(c/\omega)\vec{k}$, on peut amener (3) à $$\begin{array} {ll} \boldsymbol{\ka} \times (Z_0\vec{h}) + \eps' \vec{e} = 0, & \boldsymbol{\ka} \times \vec{e}- Z_0\vec{h} =0. \end{array} \tag{4}$$

Dans (4), on peut utiliser la deuxième équation pour éliminer $Z_0\vec{h}$ de la première, ce qui donne $$\boldsymbol{\ka} \times (\boldsymbol{\ka} \times \vec{e}) + \eps' \vec{e} = \boldsymbol{\ka} (\boldsymbol{\ka} \cdot \vec{e}) - \ka^2 \vec{e} + \boldsymbol{\eps'} \vec{e} = 0.$$ Ce système d'équations linéaires homogène, de la forme $$\mkern-4mu\begin{bmatrix} \eps'-\ka_y^2-\ka_z^2 & \ka_x\ka_ y& \ka_x\ka_z \\ \ka_y\ka_x & \eps'-\ka_x^2-\ka_z^2 & \ka_y\ka_z \\ \ka_z\ka_x & \ka_z\ka_y & \eps'-\ka_x^2-\ka_y^2 \end{bmatrix} \mkern-6mu\begin{bmatrix} e_x \\ e_y \\ e_z \end{bmatrix} = 0,$$ admet une solution si et seulement si le déterminant

$$\Delta(\boldsymbol{\ka}) = \begin{vmatrix} \eps'-\ka_y^2-\ka_z^2 & \ka_x\ka_ y& \ka_x\ka_z \\ \ka_y\ka_x & \eps'-\ka_x^2-\ka_z^2 & \ka_y\ka_z \\ \ka_z\ka_x & \ka_z\ka_y & \eps'-\ka_x^2-\ka_y^2 \end{vmatrix}$$ est nul. On peut vérifier qu'on a $$\Delta(\boldsymbol{\ka}) = \eps' (\ka^2 - \eps')^2.$$ On a donc des solutions si et seulement si $\ka=n$ où l'indice de réfraction $n$ est défini par $$n=\sqrt{\eps'}.$$ Pour la solution, n'importe quelle valeur de $\vec{e}$ telle que $$\boldsymbol{\ka} \cdot \vec{e} = 0$$ est acceptable ; $\vec{h}$ est alors déterminé par $$\vec{h} = \dfrac{1}{Z_0} \boldsymbol {\ka} \times \vec{e}.$$

2. Ondes planes : polarisation

Théorie

Une solution du type (2) conduit à un champ harmonique de la forme $$\vec{E}(\vec{x}, t) = 2\re \left[ \exp(i\vec{k} \cdot \vec{x}-i\omega t)~\vec{e} \right]. \tag{5}$$ Supposons une onde plane qui se propage dans la direction des $z$ positifs : on aurait donc, pour une valeur de $z$ fixée, des composantes $E_x(t)$ et $E_y(t)$ de la forme $$\begin{array} {l} E_x(t) = a \cos(\omega t)+ b \sin(\omega t) \\ E_y(t) = c \cos(\omega t)+ d \sin(\omega t) \end{array} \tag{6}$$ alors que $E_z(t)=0$. Deux cas peuvent se produire :

  1. $ad-bc=0$. Dans ce cas, une des compo­santes est multiple de l'autre et le point $(E_x, E_y)$ se déplace sur une droite qui passe par l'origine. On dit que le champ électrique est polarisé linéairement.
  2. $ad-bc \ne 0$. Dans ce cas, on peut écrire $$\begin{array} {ll} \dfrac{dE_x-bE_y}{ad-bc} = \cos(\omega t), & \dfrac{aE_y-cE_x}{ad-bc} = \sin(\omega t), \end{array}$$ ce qui permet de montrer que le point $(E_x, E_y)$ se déplace sur une ellipse (qui peut être un cercle). On parle alors de polarisation elliptique (ou circulaire).

Simulation

La figure interactive que voici vous permet de visualiser l'évolution des valeurs du champ électrique et du champ magnétique en un point donné. Les contrôles à gauche

permettent d'ajuster les valeurs de $a$, $b$, $c$ et $d$ dans (6) entre $-5$ et $5$. Dans la figure à droite, le point $(E_x, E_y)$ est représenté en noir et le point $(Z_0H_x, Z_0H_y)$, en vert.

3. Vitesse(s) de propagation

D'après les résultats de la section 1, $\vec{k}$ doit valoir $$\vec{k} = \dfrac{\omega}{c}n\mkern2mu\uvec{u}$$ où $n$ est l'indice de réfraction et $\uvec{u}$ est un vecteur uni­taire. On peut donc réécrire le champ harmonique (5) sous la forme $$\vec{E}(\vec{x}, t) = 2\re \left[ \exp \left(i\dfrac{\omega}{c} (n\mkern2mu \uvec{u} \cdot \vec{x}-c t)\right)~\vec{e} \right],$$ ce qui permet de constater que cette onde plane se déplace à la vitesse $c/n$ dans la direction du vecteur $\uvec{u}.$

Une conclusion s'impose tout de suite : dans un milieu dispersif¹, des ondes planes de fréquences différentes se propagent à des vitesses différentes. Un corolaire, c'est que si le champ est une superposition d'ondes planes, il va se déformer au cours de sa propagation. Cependant, dans certaines circonstances, certaines caractéristiques seront approximativement conservées.

Pour le voir, envisageons un cas un peu plus général qu'une onde plane. Pour simplifier au maximum, sup­posons un champ qui se propage dans la direction $z$, avec $E_y=H_x=0$. Dans ce cas, (1) peut être mis sous la forme $$\begin{array} {ll} -\dfrac{\partial}{\partial z} (Z_0\f{H}_y) + i\dfrac{\omega}{c} \eps' \f{E}_x = 0, & \dfrac{\partial}{\partial z} \f{E}_x-i \dfrac{\omega}{c} (Z_0\f{H}_y) =0. \end{array}$$ On verra au chapitre suivant que, pour un champ qui se propage dans le sens des $z$ positifs, la solution est

$$\f{E}_x(z, \omega)=\exp (i \omega nz/c)\f{E}_x(0, \omega). \tag{7}$$ Si $n$ était constant, il résulterait des propriétés des transformées de Fourier qu'on aurait $$E_x(z, t)=E_x(0, t-nz/c),$$ ce qui correspond de nouveau à une vitesse de propa­gation (sans déformation du signal) égale à $c/n$.

Si $n$ n'est pas contant mais que $\f{E}_x(0, \omega)\ne 0$ seulement pour des fréquences $\omega$ voisines d'une fréquence donnée $\omega_0$, on peut raisonnablement, dans (7), faire une approximation de Taylor à l'ordre 1 autour de $\omega_0$ : $$\omega n(\omega) \approx \omega_0 n(\omega_0) + [n(\omega_0)+\omega_0 n'(\omega_0)](\omega-\omega_0).$$ Si on définit la vitesse de phase $v_\varphi$ et la vitesse de groupe $v_g$ par $$\begin{array} {ll} v_\varphi^{-1} = n(\omega_0)/c, & v_g^{-1} = [n(\omega_0)+\omega_0 n'(\omega_0)]/c, \end{array}$$ (7) devient $$\f{E}_x(z, \omega)\approx e^{i (v_\varphi^{-1}-v_g^{-1}) \omega_0 z} e^{i v_g^{-1} \omega z}\f{E}_x(0, \omega),$$ ce qui veut dire qu'on aura $$E_x(z, t) \approx e^{i (v_\varphi^{-1}-v_g^{-1}) \omega_0 z} E_x(0, t-z/v_g). \tag{8}$$

L'exemple traité dans la section suivante aidera à com­prendre le sens de l'équation (8) et le pourquoi de la terminologie utilisée.

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¹ On a vu a la page précédente que la dispersion s'accompagnait automatiquement d'absorption. Nous supposerons ici que l'absorption est suffisammnet faible pour pouvoir être négligée.

4. Notes et références

Principe de la radio AM

Supposons qu'on veuille émettre sur les ondes un signal sonore d'équation $F(t)$. Le principe de la radio AM (modulation d'amplitude) consiste à émettre une onde $e^{-i \omega_0 t}$ (appelée onde porteuse) modulée par le signal $F(t)$ qu'on veut transmettre (appelé enveloppe), ce qui donne : $$E_x(0, t)=e^{-i \omega_0 t}F(t)~~\Rightarrow~~\f{E}_x(0, \omega)=\f{F}(\omega-\omega_0).$$ En supposant que les fréquences contenues dans $\f{F}(\omega)$ sont très petites comparées $\omega_0$, l'approximation de la section précédente serait valide : pour une telle onde se propageant dans la direction des $z$ positifs, on aurait selon (8) $$E_x(z, t) \approx e^{-i \omega_0 (t-z/v_\varphi)}F(t-z/v_g).$$ On constate que l'enveloppe se propage à la vitesse $v_g$ alors que la phase se propage à la vitesse $v_\varphi$.

Comparaison de la vitesse de phase et de la vitesse de groupe

On a $$v_g^{-1}-v_\varphi^{-1} = \omega_0 n'(\omega_0)/c.$$ Ceci veut dire qu'on aura $$\begin{array} {llll} v_g \lt v_\varphi, & v_g = v_\varphi & \mathsf{ou} & v_g \gt v_\varphi \end{array}$$ selon que $$\begin{array} {llll} n'(\omega_0) \gt 0, & n'(\omega_0) = 0 & \mathsf{ou} & n'(\omega_0) \lt 0. \end{array}$$

À noter : Selon Jackson (voir p. 1), il peut parfois arriver que la formule pour la vitesse de groupe donne une valeur supérieure à $c$, mais cela se passe seulement dans des cas où l'approximation (8) n'est pas valide.

Gare au piège !

Lorsqu'on passe à la convention des opticiens, il ne faut pas oublier de changer la polarisation des ondes planes :

$$\begin{array} {ll} \left( \exp(i\vec{k} \cdot \vec{x})~\vec{e} \right)_{op} = \exp(-i\vec{k} \cdot \vec{x})~\vec{e}^*, & \left( \exp(i\vec{k} \cdot \vec{x})~\vec{h} \right)_{op} = \exp(-i\vec{k} \cdot \vec{x})~\vec{h}^*. \end{array}$$

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